Coup de coeur : L’insolence de la Parole par Marie Cénec (2020)
On 28 octobre 2021 by MarieCette semaine je vous présente un coup de coeur de mes lectures de l’année écoulée. J’écris de temps à autre des recensions pour le blog de la Librairie Protestante. Dans ce cadre, j’ai eu l’énorme plaisir de découvrir et recenser le livre de Marie Cénec, L’insolence de la Parole, un essai qui continue de m’interpeller et de nourrir mes réflexions.
Le dernier livre de Marie Cénec, théologienne et pasteure à Genève, est une perle à découvrir dans la collection « J’y crois » chez Bayard. Une sorte d’essai-témoignage, entre la chronique intime et l’essai, ce petit livre d’une centaine de page est riche et profond. L’auteure s’y dévoile avec pudeur et vulnérabilité, donnant ainsi l’occasion au lecteur de la rejoindre dans ce lieu intime de l’expérience qui nous renvoie paradoxalement à l’universel. Par son exemple, elle invite le lecteur à s’interroger sur ses propres croyances, sur sa propre façon d’envisager la parole.
De la contrainte à la liberté de croire
Née dans une famille catholique traditionnelle, ayant grandi et évolué dans certains milieux évangéliques à tendance sectaire pour ensuite se tourner vers le protestantisme luthérien et calviniste, Marie Cénec a un riche passé ecclésial qu’elle explore au travers du prisme de la « parole ». Son parcours, qu’elle décrit comme « un passage de la contrainte à la liberté de croire » (p.15), est l’occasion de découvrir cette parole libre, vive et insolente qui l’encourage, la stimule et la nourrit dans sa foi.
Dès le prologue, l’auteure s’interroge : « une parole libre est-elle possible au sein de ma religion ou ne peut-elle être que transgressive, en marge, constituer une menace pour un système clos sur lui-même ? » (pp.15-16). C’est dans la vulnérabilité de sa propre existence et de son écriture que Cénec tente d’y répondre.
Au travers de ce petit livre à l’écriture fluide et agréable, Cénec explore différentes faces de cette parole et la façon dont elle agit ou est parfois entravée.
Dans les quatre premiers chapitres, elle aborde tour à tour les notions de doute, de confusion psycho-religieuse, de liberté et notamment « la liberté de ton de la Bible » (p.46), ainsi que de la lecture de la Bible. Elle dresse dans ces premiers chapitres une critique assez forte de certains milieux évangéliques, fondamentalistes à tendance sectaire dans lesquels elle a évolué. Son regard est néanmoins nuancé. Si elle critique fortement la dérive sectaire de certaines églises, elle perçoit également dans d’autres églises dites évangéliques un engagement et un sens de la communauté prononcé. Elle montre également comment la Bible qu’elle a découvert dans ces milieux et exploré lors de ses études est devenue pour elle un véritable outil de libération.
La puissance de la parole
Le chapitre 5, chapitre pivot entouré de deux poèmes de l’auteure, est une réflexion sur la puissance de la Parole, la puissance de la prédication.
La parole en Eglise et dans la réalité de nos souffrances
Les deux derniers chapitres envisagent comment la parole peut se dire et se vivre au sein de l’Église et au creux de nos souffrances.
Dans le chapitre 6, Cénec aborde ses propres luttes par rapport à l’Église, mais aussi la joie qu’elle a à être engagée dans l’oecuménisme. Si elle critique la perte de profondeur de l’Église, elle y perçoit également des sources d’espérances.
Le chapitre 7 explore la manière dont cette parole vivante est parfois libérée au travers de l’expérience de la souffrance et de nos angoisses face à notre mortalité, cette parole libre « dans laquelle trépigne l’espérance » (p.93)
Une parole insolente, créatrice et libératrice
L’épilogue, lui aussi entouré de deux textes poétiques, dévoile comment cette parole créatrice et libératrice émerge bien souvent pour l’auteure du silence fécond et d’une joie profonde.
Les textes poétiques de l’auteur qui rythment le texte sont comme des témoins d’une parole libre, insolente peut-être. Ils décalent le lecteur, ralentissent la lecture, donnent l’occasion de se poser et d’expérimenter un autre type de parole. Une manière de montrer que la parole libre se décline sous de multiples facettes.
Un livre qui encourage et qui donne espoir. Une parole qui vaut la peine d’être entendue, lue.
Recension publiée sur le blog de la Librairie Protestante le 15 janvier 2021.
J’aimerais bien le lire car » la parole libre » m’interpelle.
Merci Marie .
Un livre que j aimerais vraiment lire…merci pour ce partage alléchant Marie!